Crise ukrainienne : la Russie dévoile son mémorandum pour un règlement définitif du conflit

GeoPolitico
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La Fédération de Russie a publié un mémorandum détaillant ses conditions pour une sortie de crise en Ukraine.

Nous avons traduit intégralement le mémorandum en français. Il est disponible ici.

Istanbul, le [02 juin 2025] — La Russie a rendu public un mémorandum en trois sections proposant un règlement complet de la guerre en Ukraine, à travers des mesures à la fois militaires, politiques et juridiques. Ce document, diffusé comme base de négociation potentielle, est présenté par le Kremlin comme une « feuille de route pour la paix ». Pour Kyiv et ses alliés occidentaux, il s’agit néanmoins de revendications maximalistes traduisant une volonté de victoire diplomatique et stratégique de Moscou.

Section 1 : Les exigences fondamentales de la Russie

La première section du mémorandum énonce les conditions clés pour un règlement dit « définitif ». Parmi les demandes majeures :

  • Reconnaissance internationale de l’annexion par la Russie de la Crimée (annexée en 2014), des républiques autoproclamées de Donetsk (RPD) et de Louhansk (RPL), ainsi que des régions de Zaporojie et de Kherson – bien que toutes ne soient que partiellement contrôlées par Moscou ;
  • Neutralité de l’Ukraine, interdisant toute adhésion à l’OTAN ou autres alliances militaires, et toute présence militaire étrangère sur son sol ;
  • Démilitarisation partielle de l’Ukraine, incluant des plafonds sur la taille de ses forces armées et la dissolution des « formations nationalistes » ;
  • Reconnaissance des droits de la population russophone, statut officiel pour la langue russe, et mesures contre la glorification du nazisme ;
  • Levée complète des sanctions bilatérales et engagement à ne plus en imposer ;
  • Suppression des restrictions sur l’Église orthodoxe ukrainienne, ainsi qu’une normalisation progressive des relations diplomatiques, économiques et énergétiques.

Section 2 : Conditions pour un cessez-le-feu

Deux options sont proposées pour instaurer un cessez-le-feu :

  • Option 1 : retrait immédiat des forces ukrainiennes des territoires annexés par la Russie, avec un éloignement des lignes de front selon une distance convenue ;
  • Option 2 (dite « paquet ») : inclut l’arrêt des livraisons d’armes occidentales, la démobilisation ukrainienne, la fin de la loi martiale, la libération des prisonniers civils et politiques, et l’organisation d’élections dans les 100 jours suivant la levée de la loi martiale.

Le tout serait supervisé par un centre de surveillance bilatéral et accompagné de garanties de non-agression et d’abandon des opérations de sabotage par l’Ukraine.

Section 3 : Mise en œuvre progressive

Le mémorandum propose un calendrier séquencé de mise en œuvre :

  1. Élaboration d’un traité de paix ;
  2. Cessez-le-feu humanitaire de 2 à 3 jours pour la récupération des corps, dont 6 000 soldats ukrainiens remis unilatéralement ;
  3. Retrait complet des forces ukrainiennes en 30 jours ;
  4. Tenue d’élections ukrainiennes ;
  5. Signature du traité de paix, ratification internationale et mise en œuvre supervisée par une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU.

Une proposition qui divise

Pour Moscou, ce mémorandum est présenté comme « une offre sérieuse de paix durable ». Pourtant, aux yeux de Kyiv et de ses alliés, il s’agit d’un ultimatum politique déguisé, visant à entériner les conquêtes territoriales russes et à neutraliser militairement et politiquement l’Ukraine.

Aucune réaction officielle de l’Ukraine n’a encore été publiée, mais plusieurs analystes notent que l’acceptation de ces conditions reviendrait à une reddition partielle et à l’abandon de la souveraineté nationale sur des pans entiers du territoire.

À l’Occident, ce mémorandum impose un dilemme stratégique : soutenir l’Ukraine dans un conflit prolongé, ou pousser à une négociation sur la base de conditions jugées inacceptables par Kyiv.

Conclusion

Alors que la guerre s’enlise et que les pertes humaines et économiques s’alourdissent, ce mémorandum russe remet sur la table l’épineuse question de la paix par la force ou par la négociation. Mais pour qu’il puisse devenir une base sérieuse de dialogue, il faudrait, selon plusieurs observateurs, un rééquilibrage profond des propositions et une reconnaissance mutuelle des droits fondamentaux des deux parties.

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